15 octobre 2010

[Abbé Jürgen Wegner, fsspx (Canada) - Lettre aux Amis et Bienfaiteurs] "

SOURCE - Abbé Jürgen Wegner, fsspx (Canada) - Lettre aux Amis et Bienfaiteurs - octobre 2010

Chers Amis et Bienfaiteurs
Dieu nous promet, lors de notre départ de ce monde, l’immortalité et l’éternité : « En vérité, en vérité, je vous le dis, vous pleurerez et vous vous lamenterez, tandis que le monde se réjouira; vous serez affligés, mais votre affliction se changera en joie. » (Jean 16, 20) « Je vous reverrai, et votre cœur se réjouira, et nul ne vous ravira votre joie. » (Jean 16, 22) Dieu est la vérité même, sa parole est éternelle et immuable. Impossible qu’Il se trompe, impossible qu’Il nous trompe ! Ses mots sont sûrs et ce qu’Il nous promet se réalise.

Mais il en est qui s’étonnent de voir que les fidèles tombent aussi bien que les non-croyants sous les coups du destin. Ils sont chrétiens et du coup se croient à l’abri des maux de cette vie, pour jouir de toutes les félicités du siècle. Souffrir ici-bas toutes sortes d’adversités, en vue de la joie future, cette pensée leur paraît étrange. Voir que la mort nous frappe comme les autres leur est un scandale. Mais, dans ce monde, tout nous est commun avec le reste des hommes puisque, selon les lois de la nature, nous avons la même chair. Tant que nous restons sur cette terre, nous appartenons au genre humain par notre corps, nous en sommes séparés par l’esprit. Ainsi, en attendant que ce corps corruptible revête l’incorruptibilité, que cette chair sujette à la mort devienne immortelle et que l’Esprit nous conduise à Dieu le Père, toutes les incommodités corporelles, quelles qu’elles soient, nous sont communes avec les autres hommes. Lorsque la terre nous refuse ses fruits, la faim n’épargne personne. Lorsqu’une guerre éclate tous en sont les victimes. Lorsque l’implacable sérénité du ciel retient les pluies, la sécheresse est la même pour tous. Il en est de même de toutes les maladies: douleurs des yeux, accès de fièvre, infirmités des membres; elles nous sont communes avec le reste des hommes, parce que nous avons la même chair.

Le chrétien, comme tout homme, va souffrir des mêmes maux et n’en sera certainement pas épargné. Au contraire : si le fidèle a une idée exacte de ce qu’est la vie chrétienne, il comprendra que ses épreuves doivent être plus nombreuses que celles des autres hommes. C’est l’avertissement que nous donne l’Écriture : « Mon fils, en vous consacrant au service de Dieu, persévérez dans la justice et dans la crainte du Seigneur, et préparez votre âme à la tentation. » (Eccl., 2, 1).

Ainsi Job, après la perte de ses biens et la mort de ses enfants, couvert lui-même de plaies et de vers, ne fut pas vaincu par l’épreuve mais purifié par elle. Voyons comme l’héroïsme de sa patience éclate au milieu de tant de combats et de douleurs : « Je suis sorti nu du sein de ma mère, nu je descendrai dans mon sépulcre. Le Seigneur m’a tout donné, il m’a tout ôté; il a agi selon sa sagesse, que son nom soit béni. » (Job 1, 21)

Cette patience dans l’épreuve a toujours été la vertu des justes. Les apôtres, guidés par la loi du Seigneur, ont eu pour règle de ne pas murmurer dans l’adversité, mais de supporter avec courage et patience tous les événements de cette vie car il est écrit: « Le sacrifice agréable à Dieu est une âme brisée par la tribulation. Dieu ne rejette pas un cœur contrit et humilié. » (Ps. 51, 17)

La foi et la crainte de Dieu doivent nous préparer à supporter tous ces événements. Qu’il s’agisse de la perte de notre fortune, de la maladie qui vient tourmenter notre corps, de la mort de notre épouse et de nos enfants, regardons tous ces accidents, non comme des occasions de chute, mais comme des épreuves. Loin d’affaiblir ou de briser la foi du chrétien, ils manifestent, au contraire, son courage dans la lutte.

Il y a une grande différence entre nous et ceux qui ignorent le Dieu véritable. Ceux-ci, dans l’adversité, s’abandonnent à la plainte et au murmure; pour nous, les malheurs d’ici-bas, loin de nous détourner de la vertu et de la foi, ne font que nous fortifier davantage. Qu’il craigne de mourir celui qui n’est pas régénéré par l’eau et l’Esprit, et qui est condamné d’avance aux flammes de l’enfer. Qu’il craigne de mourir celui qui est étranger à la croix de Jésus-Christ. Qu’il craigne de mourir celui qui, après cette mort, aura en partage la mort éternelle. Il n’en est pas de même des chrétiens: ils meurent, mais pour eux, la mort, c’est la délivrance.

C’est la volonté divine et non la nôtre que nous devons accomplir, comme nous l’enseigne la prière du Seigneur. Quelle folie de demander l’accomplissement de la volonté divine, et de ne pas obéir à l’ordre de Dieu quand il nous rappelle de ce monde! Nous résistons de toutes nos forces; comme des serviteurs opiniâtres, nous arrivons tristes et chagrins en la présence du Maître; c’est une nécessité fatale et non la soumission de notre volonté qui nous fait quitter ce monde. Nous allons à Dieu malgré nous: et nous attendons de lui la récompense céleste. Pourquoi cette prière, si nous préférons être ici-bas plutôt que de régner avec le Christ?

Dieu a daigné nous manifester les secrets de sa Providence : que nous ne devons pas pleurer nos frères lorsque, à la voix du Seigneur, ils sortent de ce monde. Ils ne sont pas perdus pour nous, mais ils nous devancent; ils ne s’éloignent pas, ils vont nous attendre là-haut. Nous devons les regretter, mais non les pleurer. Ne prêtons pas le flanc aux ennemis de la foi : c’est avec raison qu’ils nous reprocheraient de pleurer comme à jamais perdues des âmes que nous disons vivantes auprès de Dieu; c’est avec raison qu’ils se plaindraient de ne pas trouver, dans nos actions, la foi que nous exprimons par nos paroles. Agir de la sorte, ce serait mentir à notre espérance et à notre foi; notre langage serait celui d’un comédien. Qu’importe que la vertu brille dans nos paroles, si nos actes la démentent ?

L’apôtre saint Paul condamne ceux qui, à la mort de leurs proches, se livrent à une tristesse excessive : « Nous ne voulons pas, mes frères, que vous soyez dans l’ignorance sur ceux qui dorment du sommeil de la mort, afin que vous ne soyez pas contristés, comme ceux qui n’ont pas d’espérance. Si nous croyons que Jésus est mort et ressuscité, nous croyons aussi que Dieu ressuscitera avec Jésus ceux qui sont morts en lui. » (1 Thess. 4, 13) D’après l’apôtre, ce sont les hommes sans espérance qui sont contristés par la perte de leurs proches. Mais nous qui vivons d’espérance, qui croyons en Dieu, qui savons que Jésus-Christ est mort et ressuscité pour nous, nous qui demeurons dans le Christ et qui ressusciterons par lui et en lui, pourquoi ne voulons-nous pas quitter cette vie, ou bien pourquoi pleurons-nous ceux qui partent, comme s’ils disparaissaient pour toujours? Et pourtant Jésus nous dit: « Je suis la résurrection et la vie, celui qui croit en moi, quoique mort, vivra; et tout homme qui vit et croit en moi ne mourra pas éternellement. » (Jean 11, 25) Si nous croyons au Christ, ayons foi en ses promesses, et sûrs d’éviter la mort, attachons-nous à lui, puisque c’est avec lui que devons vivre et régner toujours. Mourir c’est passer à l’immortalité ; on ne peut arriver à la vie éternelle, si on ne quitte cette terre. La mort n’est donc pas un exil, c’est un passage qui nous mène du temps à l’éternité. Qui ne se hâterait vers un avenir meilleur ? Qui ne voudrait devenir semblable au Christ et arriver à la dignité de la grâce céleste ? L’apôtre saint Paul nous dit : « Notre conversation est dans le Ciel. C’est de là que nous attendons Jésus-Christ, notre maître, qui transformera ce corps terrestre en le rendant semblable à son corps glorieux. » (Philip. 3, 21) Jésus Christ veut que nous soyons heureux avec lui dans les demeures éternelles et Il prie : « Mon Père, je veux que ceux que vous m’avez donnés soient avec moi, et qu’ils voient l’éclat dont vous m’avez environné avant l’origine du monde. » (Jean 17, 24) Confiants dans la promesse du Seigneur qui est toute vérité, réjouissons-nous de notre départ et de notre translation.

Nous comprenons qu’il veuille rester longtemps dans le monde celui qui est aimé du monde. Mais le monde hait le chrétien ! Pourquoi ne suivons-nous pas plutôt le Christ qui nous a rachetés et qui nous aime ? Saint Jean, dans son épître, nous exhorte : « N’aimez pas le monde, dit-il, ni ce qui est dans le monde. Si quelqu’un aime le monde, la charité du Père n’est plus en lui. » (1 Jean, 2, 15)

Chers fidèles, pendant ce mois de novembre, prions pour les âmes du Purgatoire. Ces âmes sont parties de ce monde avant nous, sans être suffisamment purifiées pour le monde futur. Elles souffrent encore pour se préparer à cette rencontre éternelle avec Dieu. Désormais ils ne peuvent plus rien faire pour eux-mêmes, mais nous avons confiance que nos prières les aideront ! Pour nous-mêmes, ayons le courage de choisir comme sujet de méditation les grandes vérités de la fin de notre vie. Notre effort nous méritera de diminuer notre peur de la mort et d’augmenter notre espérance dans les biens futurs.

Comme les années précédentes nous vous invitons à remplir vos enveloppes avec les intentions de prière pour vos défunts. Pendant tout le mois de novembre nous allons les poser sur nos autels, afin de les inclure dans le Sacrifice de Notre-Seigneur. Que son Précieux Sang les lave de toute tache du péché et leur ouvre la voie vèrs les demeures éternelles.

Abbé Jürgen Wegner