8 février 2013

[Jean Madiran - Présent] Sans quoi le germe s’étiole et meurt

SOURCE - Jean Madiran - Présent - 8 février 2013

• Le débat autour des conséquences directes ou indirectes de Vatican II semble continuer à ignorer le comment et le pourquoi de la longue disparition du catéchisme catholique.

Ici comme ailleurs avait joué la rumeur, rapidement devenue opinion dominante, que ce qui était antérieur au Concile devait désormais être tenu pour périmé. Tous les catéchismes existants furent disqualifiés.

Pendant vingt-sept années, de 1965 à 1992, l’Eglise s’est trouvée sans catéchisme officiel. L’espace d’une génération, il y eut une vacatio catechismi. Et de 1965 à aujourd’hui, l’absence de petit catéchisme pour enfants baptisés est une vacatio de quarante-huit ans dont on n’aperçoit pas la fin.

-Le plus grand nombre des catholiques le sont parce que leurs parents les ont fait baptiser à leur naissance et ont veillé sur leur éducation catholique romaine :

« Une âme de petit enfant baptisé, écrivait Henri Charlier, a besoin d’un enseignement chrétien constant pour nourrir le germe que le baptême a déposé dans son âme. Sans quoi le germe s’étiole et meurt.

• En France, la vacatio catechismi, où le germe s’étiole et meurt, a son histoire particulière. Le noyau dirigeant de l’épiscopat avait adopté dès les années 1945-1950 les idées du « catéchisme progressif » inventé par le chanoine sulpicien Joseph Colomb. Il fut bloqué par Pie XII en 1957. Mais les idées catéchétiques du chanoine Collomb sont restées totalement celles du noyau dirigeant au moins jusqu’en 1970, et encore très largement par la suite. Il a ainsi fabriqué une succession de documents impérieux, le « fonds obligatoire » en 1967-1968, initiateur d’une sorte de nouvelle religion, le « texte de référence » en 1980, « pierres vivantes » et « parcours » en 1982, toujours « nouveaux » par rapport aux précédents, toujours « mieux adaptés » à ses deux sources trompeuses : l’évolution du monde et les supposés progrès des pédagogies profanes. Cet intense foisonnement n’a nullement atténué la vacatio catechismi, car ce n’étaient pas des catéchismes : le cardinal Ratzinger, donnant en 1985 l’autorisation d’imprimer Pierres vivantes, tenait à préciser que ce n’était pas une « approbation canonique puisque ce n’est pas un catéchisme».
 
• Pour l’instruction religieuse des enfants, les prêtres réfractaires à l’idéologie dominante utilisèrent surtout le Catéchisme à l’usage des diocèses de France (1947), très médiocre mais ayant l’avantage d’avoir été épiscopalement interdit après 1965 comme antérieur au Concile, cette interdiction lui donnant en quelque sorte une garantie d’authenticité.
 
De leur côté les laïcs réfractaires rééditaient en 1967, au titre d’« antidote », le Petit et le Grand catéchisme de saint Pie X, en 1969 le Catéchisme du concile de Trente, en 1977 le Catéchisme de la famille chrétienne du P. Emmanuel. Ces publications furent, à grands renforts de grimaces et d’insultes, dénoncées comme « intégristes ». Elles sont utilisées encore aujourd’hui, souvent discrètement, dans les paroisses…
 
• En 1985, après vingt années de vacatio catechismi, Jean-Paul II convoqua un synode des évêques afin de conclure à la nécessité de rédiger « un catéchisme de toute la doctrine catholique » pour l’Eglise universelle. La réalisation en fut devancée en 1991 par le Catéchisme pour adultes de l’épiscopat français qui, depuis 1937 et 1947, tient à avoir « son » catéchisme. Et c’est seulement le 11 octobre 1992 que le Catéchisme de l’Eglise catholique (CEC) fut promulgué par Jean-Paul II. Son « édition typique » en latin parut en 1997, et en 1998 sa traduction française. Suivirent en 2005 son résumé, le Compendium, et en 2011 le Youcat « pour les jeunes ».
 
Mais maintenant cela fait près d’un demi-siècle qu’officiellement, dans l’Eglise catholique, n’existe plus de petit catéchisme pour enfants baptisés.
JEAN MADIRAN
Article extrait du n° 7788 de Présent
du Vendredi 8 février 2013