23 octobre 2011

[Henrik Lindell - Témoignage Chrétien] Touche pas à mon missel !

SOURCE - Henrik Lindell - Témoignage Chrétien - 23 octobre 2011

Une nouvelle traduction du missel en anglais entrera en vigueur aux États-Unis le 27 novembre. Elle correspondrait mieux à la version originale en latin. Mais certains catholiques sont mécontents.

Le coup d’envoi a été donné pour le 1er jour de l’Avent. A partir de cette date, le 27 novembre, les 70 millions des catholiques aux États-Unis devront apprendre à dire la messe avec des mots auxquels ils ne sont pas habitués.
Cette nouvelle traduction d’un missel en anglais a été préparée depuis plusieurs années par des dizaines d’évêques, des linguistes et aussi des spécialistes du Vatican. Et comme c’est souvent le cas quand on change un missel (le livre liturgique qui rassemble les textes et les indications rituelles et musicales nécessaires à la célébration de la messe), les esprits catholiques s’échauffent et se divisent en deux camps : les pour et les contre.

Pétition
Les pour, qui rassemblent notamment et par définition les évêques, se félicitent de la nouvelle version parce qu’elle est indiscutablement plus proche des textes originaux du missel latin et des Écritures que la traduction actuellement en cours. Telle était l’intention du Saint-Siège, qui a exigé en 2001 dans l’instruction Liturgiam authenticam, des textes « traduits intégralement et d’une manière aussi exacte que possible, sans omissions ni additions en ce qui concerne le contenu ».
Une décision qui était quasiment une mise en cause directe de l’actuelle traduction anglaise. Faite dans l’enthousiasme en 1970 après le Concile Vatican II et approuvée par les conférences épiscopales américaines, cette dernière est connue pour ses formules souvent éloignées de celles qu’on récitait auparavant en latin.
Un exemple : dans une messe catholique en France, l’assemblée répond souvent « et avec votre esprit ». Cela correspond à la formule latine : « Et cum spiritu tuo. » Aux États-Unis, on dit « and also with you » (« et avec vous » en français). Dans le nouveau missel anglais, on trouve désormais cette expression : « And with your spirit », soit une traduction littérale du latin.
Les contre, eux, sont déçus pour deux raisons : les consultations avec les laïcs et des prêtres « du terrain » ont été sommaires et le Vatican n’a guère écouté les arguments de nombreux théologiens libéraux qui trouvent normal que le missel puisse prendre des libertés avec le texte original latin. C’est la différence entre l’esprit et la lettre, disent-ils.
L’opposition la plus farouche a été menée par des collaborateurs du magazine jésuite America. 22 500 catholiques ont signé une pétition qui exige le retrait de la nouvelle traduction. Le révérend Michael G. Ryan, prêtre à Seattle et un des initiateurs de la pétition, s’en prend à ce retour au latin.
Prenons par exemple cette nouvelle expression sur Jésus : « consubstantiel avec le Père. » Une trouvaille qui remplace l’ancienne formule « Un avec le Père », pourtant très claire !
Pour le Père Ryan, tout cela est contraire à l’esprit de Vatican II. Celui-ci avait d’ailleurs autorisé les conférences épiscopales à choisir les traductions qui leur semblaient les meilleures. « Et si on faisait jouer plutôt la collégialité, le dialogue et la perception réaliste des besoins pastoraux de notre peuple ? » demande-t-il en introduction de l’appel.

Dans les mots

Pour les évêques américains, cette mise en cause est très excessive. Gregory Aymond, archevêque de La Nouvelle-Orléans et président de la Conférence des évê­ques, s’éver­tue à expliquer que « les seuls changements sont dans les mots, pas dans le rite ».
À l’instar de Benoît XVI, il considère aussi que « ce changement nous amène à réfléchir à ce que nous disons vraiment à la messe ». Parmi les exemples mis en avant par les évêques, on trouve aussi le célèbre verset de l’évangile de Matthieu : « Buvez-en tous, car ceci est mon sang, le sang de l’Alliance, répandu pour la multitude en rémission des péchés  » (Mt 26.28). Dans le missel anglais des Américains, on dit « répandu pour tous ».

Une idée conforme à l’esprit des Écritures, selon les évêques, mais pas conforme aux mots vraiment utilisés par les évangélistes. Le débat continue…