12 décembre 2008

[Jean Madiran - Présent] La calomnie

SOURCE - Jean Madiran - Présent n° 6736 - 12 décembre 2008

D’un article du magazine Permanences, il ressort que les catholiques qui préfèrent la messe traditionnelle :
+ ou bien y sont attachés par leur « sensibilité propre », c’est-à-dire subjective ;
+ ou bien refusent la messe de Paul VI parce qu’ils nient sa validité.

C’est une calomnie : les catholiques qui contestent la messe de Paul VI ne le font ni par négation de sa validité, ni par un attachement de leur sensibilité propre, c’est-à-dire subjective, à la messe de saint Pie V.

Voici le texte de l’insupportable accusation, qui invoque, un peu arbitrairement semble-t-il, l’autorité morale de Christophe Geffroy :
« Comme l’expose Christophe Geffroy dans son Benoît XVI et « la paix liturgique », croire que l’Eglise se trompe depuis quarante ans dans la liturgie qu’elle utilise revient à refuser l’assistance divine. Que des catholiques soient davantage attachés, par leur sensibilité propre, à ce que Benoît XVI a nommé la forme extraordinaire du rite, c’est tout à fait compréhensible, de même qu’ils puissent émettre leur avis, poser des questions sur tel ou tel point de la forme ordinaire. En revanche, qu’ils estiment que ce n’est pas une liturgie valide pose un véritable problème de foi. La non-reconnaissance du rite de Paul VI revient à nier à Rome son autorité, etc. »
Ce texte de Permanences a pour auteur Claire de Guillebon.

Elle nous apparaît comme la première victime de cette vieille calomnie, qu’elle n’a évidemment pas inventée, et qui l’a tout à fait trompée. Depuis quarante ans les traditionalistes précisent explicitement et n’arrêtent pas de répéter que ce qu’ils contestent dans la messe de Paul VI, ce n’est pas sa validité quand elle est célébrée conformément au texte promulgué et dans l’intention de faire ce que fait l’Eglise : mais c’est fort loin d‘être toujours le cas.

Le magazine Permanences est l’organe de la rue des Renaudes. On observera qu’il ne s’y est trouvé personne pour éclairer Claire de Guillebon et lui expliquer que la seule validité contestée par les traditionalistes est celle de l’interdiction par Paul VI de la messe traditionnelle. Cette invalidité-là se trouve officiellement reconnue comme telle par le motu proprio du 07.07.07. L’interdiction était une prévarication du pape et de beaucoup d‘évêques. Reconnaître ce fait prévaricateur, ce fait public et prolongé, mais non sans précédents historiques – que Claire de Guillebon se rassure – ne pose en réalité aucun « véritable problème de foi » et ne « refuse » aucune « assistance divine ».

Comment expliquer, dira-t-on, une telle sous-information ? C’est pourtant bien simple. En 1970, la Rue Des Renaudes a frappé d’exclusion ceux qui refusaient l’interdiction de la messe traditionnelle et contestaient publiquement l’article 7, inspirateur de la nouvelle messe ; elle a tout à fait rompu avec eux, elle ne les connaissait plus, ne les lisait plus, ne les écoutait plus, ils n‘étaient plus acceptés aux congrès de Lausanne, leurs personnes, leurs livres et leurs journaux étaient frappés d’une relégation sociologique, du même genre en somme que celle d’origine laïciste qui frappait la Rue Des Renaudes elle-même. On n’y a donc plus été informé sur les traditionalistes que par ouï-dire, par des rumeurs, des hypothèses, des suppositions. Et cette sous-information volontaire s’est prolongée jusqu‘à maintenant : on peut être lecteur assidu de Permanences et tout ignorer du courant traditionaliste dans l’Eglise et dans la société.

La rédaction de Permanences doit aux traditionalistes, et aussi à ses lecteurs, des excuses et une rectification détaillée. Nous le lui disons pour le cas où elle ne s’en serait point aperçue ; et nous le lui rappellerons si d’aventure elle l’oubliait.
JEAN MADIRAN

Article extrait du n° 6736 de Présent, du Vendredi 12 décembre 2008