19 mars 1981

[Mgr Lefebvre - FSSPX - Lettre aux Amis et Bienfaiteurs (n°20)] "Constatant avec douleur que les conséquences de la Révolution conciliaire semblent vouloir s’institutionnaliser et supplanter les véritables institutions catholiques"

SOURCE - Mgr Lefebvre - FSSPX - Lettre aux Amis et Bienfaiteurs (n°20) - 19 mars 1981

Bien chers amis et bienfaiteurs,

Constatant avec douleur que les conséquences de la Révolution conciliaire semblent vouloir s’institutionnaliser et supplanter les véritables institutions catholiques, risquant d’en arriver aux mêmes résultats que dans la société politique qui sombre dans la Révolution permanente, notre résolution de maintenir à tout prix les institutions divines de l’Eglise, de les étendre, de les développer doit être plus ferme que jamais : car si les sociétés politiques peuvent disparaître, l’Eglise ne le peut pas.

D’autre part nous constatons avec joie, et nous en rendons grâces à Dieu, que les œuvres traditionnelles tant de la Fraternité Sacerdotale Saint Pie X que des autres sociétés sont en expansion humainement inexplicable. Une autre consolation et un autre encouragement est celui de voir se resserrer les liens de toutes ces courageuses initiatives avec la Fraternité.

Vous le savez, nous n’avons jamais voulu nous considérer comme les chefs de file de ce renouveau de l’Eglise et de cette résistance à la Révolution dans l’Eglise. Mais à mesure que nos grands Séminaires se multiplient, comme nos Prieurés, nos écoles, nos maisons d’exercices spirituels, puisque, grâce à Dieu, nos prêtres se multiplient et se multiplieront surtout à partir de 1983, il est normal que cette grande espérance que représente cette jeunesse sacerdotale attire la confiance de toutes les initiatives traditionalistes : religieux, religieuses actifs et contemplatifs, prêtres séculiers sentent le besoin de se rattacher à ce cep vigoureux plein de foi, de vérité et de grâce, fortement enraciné dans la Tradition de vingt siècles de l’Eglise.

Ces liens plus étroits dans la foi et dans l’apostolat me paraissent très importants pour l’avenir de l’Eglise. Car nous voulons travailler dans la confiance absolue dans la Providence qui permettra qu’un jour, désigné et connu d’elle-même, le Souverain Pontife reconnaîtra le bienfait incomparable de toutes ces œuvres et en rendra grâces à Dieu. Aucun argument valable ne nous oblige de rompre les liens avec le Pape. Au contraire de nombreux motifs irréfutables nous obligent à demeurer unis à lui comme Successeur de Pierre, ce qui d’ailleurs rend nos protestations et nos refus plus efficaces et plus justes. Cela ne diminue en rien notre attachement à la Tradition. C’est par estime pour le Successeur de Pierre que nous concevons comme impossible toute contradiction dans le Magistère de Pierre.

Ainsi au milieu de cette grande tourmente, qui attire la malédiction de Dieu sur l’humanité, continuons avec sérénité, confiance en Dieu, notre travail de restauration de l’Eglise, en extension sans doute, en multipliant les heureuses initiatives de reconstruction, mais surtout en profondeur par la sanctification qui est cette « bonus odor Christi », cette « bonne odeur du Christ » qui monte droit vers Dieu comme le sacrifice d’Abel, et qui nous attirera les bénédictions de Dieu.

A l’occasion de la visite au Mexique, ceux qui m’accompagnaient et moi-même avons pu constater la situation tragique de ce peuple de 77 millions d’âmes presque toutes catholiques. Les pasteurs ont abandonné leur peuple pour s’adonner à la politique de la Révolution, débordant sur sa gauche le Gouvernement pourtant très lié à Fidel Castro. Un certain nombre de fidèles ont chassé de leurs églises les prêtres progressistes et nous supplient de prendre la relève. A Cordoba un vicaire encore bien jeune, dans une tenue qui n’avait rien d’ecclésiastique, est venu me voir pour me faire part de ses sentiments dans ces termes : « Monseigneur, c’est vous qui avez raison, vous avez avec vous l’Esprit Saint, la grâce, chez nous il n’y a plus qu’un masque religieux derrière lequel il n’y a plus rien. Je tenais à vous dire ces choses à l’occasion de votre passage. Monseigneur, bénissez-moi. » Et il partit. Je restais stupéfait, mais une fois de plus confirmé dans la nécessité de continuer notre action pour le salut des âmes. Nous avons, par la grâce de Dieu, déjà 14 séminaristes mexicains, alors qu’il n’y aurait eu que deux jeunes prêtres ordonnés pour tout le Mexique l’an dernier. Que Notre Dame de Guadeloupe protège son peuple bien aimé !

Nous recommandons donc à nouveau toutes nos œuvres à vos prières, à votre générosité. Nous construisons le grand Séminaire de Buenos Aires, nous agrandissons le grand Séminaire de Ridgefield aux USA, et bientôt nous serons obligés de dédoubler Ecône devenu trop étroit. Il nous faudra faire quelque chose en France. Que saint Joseph nous vienne en aide. Nous lui devons une immense reconnaissance pour tout ce qu’il nous a aidé à réaliser.

En vous souhaitant une bonne semaine sainte et d’heureuses fêtes de Pâques, nous demandons à Jésus, Marie et Joseph de vous combler de bénédictions.

+ Marcel Lefebvre
Fête de saint Joseph
19 mars 1981